Texte : Marco Polisson – C’est sous les tentes du village du LOU Rugby au Matmut Stadium de Gerland que 450 amis du pâtissier MOF Gabriel Paillasson se sont réunis pour un ultime adieu, autour de son épouse Mathy, de ses enfants Nathalie et David et de ses petits-enfants.
Il fallait trouver un lieu laïque et qui fasse sens à l’agnostique qu’il était. Après moult hypothèses, ce fut donc Gerland. Non pas que Gabriel Paillasson soit un fervent supporter de notre équipe rouge et noir, mais parce le club lyonnais a pour premier actionnaire Olivier Ginon, président du groupe GL events, organisateur du SIRHA et… de la Coupe du Monde de la Pâtisserie. Un billard à trois bandes comme les aime le Vobs, rendu possible grâce à l’implication de Florent Suplisson et du traiteur Jean-Paul Pignol.
Après les décès du chevillard Marcel Gabriel et du restaurateur Daniel Abattu, créateur du Gourmandin, c’est une troisième figure des métiers de bouche que perd la galaxie gastronomique lyonnaise en l’espace de quelques semaines.
Un Compagnon (avec une majuscule), baptisé « Forézien intrépide », auquel son biographe Christophe Magnette a consacré une chronique remarquée sur notre antenne, le surlendemain de son décès. « Un très bel hommage » dixit Didier Latapie, ami de longue date du pâtissier le plus décoré de la planète. Une notoriété construite sur ses plans de travail, et non dans les cadrages de la télé-réalité.
Compagnons du Devoir et Meilleurs ouvriers de France au coude à coude
Tout comme Christophe Marguin, Gabriel Paillasson adorait les médailles et les récompenses. Ce n’est pas faire offense au président des Toques Blanches Lyonnaises que de souligner que le créateur de la Coupe du Monde de la Pâtisserie le surpassait largement avec pas moins de 300 distinctions à son tableau de chasse.
Au sein d’une corporation très hiérarchisée, l’humble Gabriel régnait en maître. L’archange de la pâtisserie française a donc été « raccompagné » avec les honneurs dus à son rang.
Depuis le décès du frère Fernand Galula, on n’avait pas revu pareil cérémonial laïque à Lyon. Du grand art et une belle haie d’honneur. Mais, en cette grise matinée hivernale, dans le temple de Gerland, ce ne sont pas les francs-maçons en tablier qui mènent la danse mais leurs « cousins » de l’Union compagnonnique des devoirs unis. Cette association centenaire incarne le rassemblement, en un même mouvement, des sociétés de Compagnons et des Devoirs.
Il s’agit d’une société d’entraide mutuelle très codifiée, avec sa hiérarchie et ses rites
Ses membres, présents en nombre à Gerland, sont en tenue de deuil. En travers du buste, ils arborent des écharpes noires ou de couleur en fonction de leur métier et société respective. En mains, une canne agrémentée d’une pastille au pommeau frappé de symboles : « le compas évoque les notions de précision, de juste mesure, de pensée ou de divin. L’équerre, celles de droiture, de conformité à la règle, ou encore de matière. Le niveau symbolisera l’égalité, la balance, la justice » décrypte le site internet du Musée du Compagnonnage.
Un maitre de cérémonie – ou rouleur – accueille les amis du défunt. De son nom de compagnon « Dauphiné Cœur Persévérant », il arbore un haut de forme enrubanné et assure le protocole (photo ci-dessus). Également dans l’assistance, les vestes blanches au col tricolore des Meilleurs Ouvriers de France tranchent avec le noir ambiant. Dans cette société, là encore, Gabriel Paillasson régnait en maitre, titulaire qu’il était d’un doublé retentissant : MOF Glacier et MOF pâtissier.
Durant la cérémonie, faite d’hommages et de chants, le rouleur et quatre compagnons forment une garde rapprochée autour du cercueil durant deux heures
Ils n’ont pas été choisis par hasard et sont disposés, canne en main, sur les quatre angles. On retrouve « Dauphiné La Fidélité« , président de la Ville de Lyon des compagnons des devoirs unis, et compagnon tailleur de pierre ; « Hainaut Le Courageux« , filleul de GP, compagnon pâtissier des devoirs unis, venu tout spécialement du Canada ; « Forézien La Tempérance » un autre de ses filleuls, compagnon pâtissier des devoirs unis de Lyon et enfin son ami Jean Philippon dit « Bordelais La Constance« , compagnon cuisinier des devoirs unis à qui reviendra l’honneur de prononcer le dernier discours.
Aucun élu de la Mairie de Lyon…
Si les chefs étaient en nombre, au rayon politique, ce fut un désert d’élus lyonnais à l’exception d’Hervé Brun, adjoint au maire du 6ème. Aucun Vert à l’horizon, ce qui n’a pas échappé à André Gérin (photo ci-dessus), et ulcéré le journaliste Michel Godet. « On était en accord sur deux thèmes : défendre la République et remettre la France au travail » nous glisse l’ancien maire communiste de Vénissieux, avec en tête le souvenir de quelques batailles électorales évoquées par le maire de Saint Fons, à la tribune.

« La canne que les compagnons portent en main est un souvenir du temps où les compagnons de tous métiers faisaient le tour de France à pied, de la fin du médiéval à la fin du 19ème siècle. Elle a été conservée comme un élément symbolique du tour de France et du compagnon » décrypte Jean Philippon
De tous les hommages, on retiendra les mots-clés qui sont désormais gravés dans la mémoire collective du premier ambassadeur de la pâtisserie française dans le monde : travail, transmission, excellence, humilité, artisanat… ainsi qu’une formule qu’affectionnait ce petit dormeur, levé chaque jour à 4 heures. « Il faut être là quand la chance passe : très tôt le matin, et très tard le soir ».
Village du LOU Rugby à Gerland
Vendredi 5 décembre 2025



































































Gaby un personnage hors du commun dans tous les domaines. Nous sommes né dans la même région, nous avons travaillé trente ans, l’un à côté de l’autre, moi je fabriquais des velos lui ? j’avais 1 mois de plus que lui, nos femmes le même âge, nos fils tous les 2 David etc…
Artisan(s), et même Artiste(s). Que du Respect. Des vies de travail, dans le respect des clients, des produits qu’ils traitaient, avec le souci, presque un devoir, de transmettre.