Distingué MOF (Meilleur Ouvrier de France en 2000), Nicolas Salagnac redonne de l'éclat à un métier d'art gentiment oublié : graveur médailleur. Fort de son savoir-faire et s'appuyant sur la tradition de Lyon, il espère conquérir les Emirats et la Principauté de Monaco. En attendant de lointains voyages, il évoque son aller-retour express en Italie où il a livré la nouvelle médaille de la Villa Medicis.
Nicolas Salagnac va d'un bon pas sur ses quarante ans, mais la petite phrase de son grand-père ébéniste dessine toujours sur ses lèvres un joli sourire de gosse. Il est né en 1969 en Normandie d'un papa ingénieur textile et d'une maman professeur de danse classique. « Je passais souvent le mercredi dans son atelier, mon grand-père concentré sur ses chaises normandes, moi, sur mes menus bricolages. Un jour, il m'a dit : « Quand tu seras grand, tu iras à l'Ecole Boule ». Cette phrase est entrée dans ma tête et n'est jamais ressortie. Et effectivement, des années plus tard, j'ai sans doute donné vie à son rêve en intégrant cette école, la référence pour des générations d'ébénistes ». Le déclic se produira en 3ème lors d'une visite dans un établissement technique. « Imaginez 5 000 écoliers, des escaliers avec des sens interdits, des ateliers de montage électro-truc. À cette époque, je ne m'intéressais pas beaucoup à l'école et elle à moi. Le soir, je me suis dit : Je ne peux pas finir là et je me suis mis à travailler ». Nicolas obtient le sésame d'entrée et fait sa première valise, pour Paris. Le petit garçon ignorait alors que ses trois frères et sœurs prendraient le même chemin. Il ignorait également qu'il délaisserait l'ébénisterie au profit de la gravure, même si aujourd'hui, le bois et son odeur reviennent lui chatouiller le nez. Quatre ans après l'obtention de son diplôme, en 1994, Nicolas Salagnac débarque à Lyon chez Fia, une filiale d'Augis. « J'en avais assez des petits boulots. Mon seul regret est de n'avoir pas su saisir la perche lorsque la Maison Cartier m'a proposé une place. Que dire ? Je n'étais pas réveillé, pas prêt… ». Ici, l'installation a été dure. « Je ne connaissais personne et je devais prendre la responsabilité d'un atelier ». Six ans passent. En 2000, il rejoint la petite fratrie des MOF, Meilleur Ouvrier de France. « J'ai beaucoup travaillé, le soir, les week-ends et pendant les vacances ». Les souvenirs sont néanmoins joyeux. « Je suis allé voir « les anciens » à Paris avec une partie de mes outils et les matrices de mon travail. Une sorte de voyage initiatique… » En 2003, Nicolas Salagnac démissionne et se met à son compte. Les graveurs médailleurs sont une espèce d'artisans en voie de disparition à protéger. « Aujourd'hui, les maisons coulent les unes après les autres. Le monde de la médaille est en chute libre. Il ne sert à rien de se battre contre les Chinois. Je creuse ma niche et montre ce que les autres ne font plus qualitativement parlant. Avec ma médaille au carré, je n'ai rien inventé, je tente juste de renouveler cet art ancestral. Il existe un véritable travail de composition et de savoir-faire qui engendrent forcément un coût. Une grande part de mon travail consiste à aller mettre mes pieds dans les coins de portes pour qu'elles ne se referment pas. J'espère séduire les Emirats et la Principauté de Monaco ». Nicolas Salagnac explique comment de fil en aiguille, il a découvert la place qu'occupait Lyon. « Il existe une véritable tradition du frappé de la monnaie et des médailles. À l'époque de Lugdunum, il y avait la monnaie des Trois Gaules. C'est également ici, il y a plus de 500 ans que l'on a frappé la première médaille française pour le passage de Louis XII et d'Anne de Bretagne. Si la médaille n'a rien de terrible, l'événement est significatif ». Il parle aussi des deux familles qui se partageaient le marché : Augis et Penin. Ce dernier a d'ailleurs réalisé la première médaille de la ville de Lyon en 1919. Dans la foulée, on apprendra que Gérard Collomb a passé commande à Nicolas, que le dossier a connu sept ans de souffrance compte tenu des lourdeurs administratives. Finalement, la médaille a été officiellement remise le 29 novembre 2006.
Nicolas Sarkozy lui a également passé commande.La clientèle de Nicolas Salagnac est essentiellement institutionnelle. Il s'agit de créer et réaliser des médailles commémoratives ou de reconnaissance. « Ce geste de remerciement sauve notre métier ». Malgré tout, Nicolas n'épargne pas sa peine et est perpétuellement en situation de démarchage. Ainsi, suite à l'élection de Nicolas Sarkozy, il propose ses services à la République via Emmanuelle Mignon. Le premier rendez-vous à l'Elysée à lieu en septembre 2007. Après neuf mois de gestation dont deux le nez dans le guidon, il livre sa médaille. En argent massif pour l'occasion, elle sera officiellement remise au Pape Benoît XVI en septembre 2008. « Je me souviens surtout d'une fois où je suis monté à Paris avec mes modelages en plâtre dans un sac à dos. Ils ont été tellement impressionnés par la démarche et le poids qu'ils m'ont fait accompagner à la gare en voiture. Ils s'attendaient certainement à des dossiers en papier ou électroniques… » Pour la médaille de la Villa Médicis (photo ci-dessus) commandée par Frédéric Mitterrand, tout est allé très vite, commande, conception, réalisation, livraison. En deux mois, le tour était joué et le 5 décembre, la médaille était remise à la centenaire Rita Levi-Montalcini (prix Nobel de médecine en 1986). « J'ai vécu un moment très fort en émotions d'autant que je logeais sur place. Un décor de dingue ; un lit à baldaquin ; des tapisseries incroyables ; un plafond impressionnant ; un clavecin… et dans les couloirs, les portraits de Louis-Oscar Roty, Raymond Joly ou Louis Muller… ». Hormis pour le travail, Nicolas Salagnac ne voyage pas beaucoup. « Pour l'instant, je suis à 200% investi dans mon projet. Maintenant que j'ai prouvé mon savoir-faire, je dois le faire savoir, et cela laisse peu de temps aux loisirs. Dernièrement, je suis allé avec mes deux enfants à Lausanne visiter le musée des Jeux Olympiques. Au bout d'un moment, ils m'ont fait comprendre qu'on pouvait décoller ». Nicolas Salagnac est comme ça, il « kiffe » devant les médailles. Autre particularité, ce quadra n'est pas un spectateur lambda des J.O. Si la performance et les athlètes sont du voyage, lui se concentre davantage sur devinez quoi ? « J'enrage de voir le peu de temps qu'on accorde aux médailles. La caméra semble fuir… C'est l'aspect déformant du métier. Mon œil est rarement neutre. Il en va de même pour les monnaies. J'ai du mal à me retrouver dans les pièces modernes. La semeuse de Roty a perdu de sa superbe. Il faut sans doute du moche pour apprécier le beau. Il faut vivre avec son temps certes, mais cela ne m'empêche pas de vouloir aussi redonner du sens aux valeurs… »
Mon passeport « Je suis un grand voyageur intérieur. »
Mon iopode « J'écoute beaucoup de musique, surtout classique. »
Mon parfum « L'eau de toilette 1881 de Cerruti. »
Mes encombrants « Les plâtres blancs et matrices en acier qui permettent une meilleure lisibilité. »
Mon diplôme « Diplômé de l'Ecole Boule en 1989. »
Mon enfance « L'atelier de mon grand-père. »
Mes fiertés « Les dernières en date : celle pour le Président de la République Française et celle pour la Villa Médicis. »
Mes basiques « Une brosse à dents, un rasoir manuel… rien de très glamour. »
Mon livre de chevet « Passagère du silence de Fabienne Verdier. Ce livre me touche et parle de ce que je vis moi-même. »
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