Texte : Jocelyne Vidal – Déterminés à se faire entendre, malgré le mur de silence opposé à leurs demandes, les commerçants de l’avenue des Frères Lumière le clament haut et fort, par la voix du président de l’UCAM.
« Le projet d’aménagement de l’avenue est un désastre, nos commerces sont désertés, nos recettes s’effondrent, nous accusons en moyenne une perte de chiffre d’affaires de 30%, baisse qui atteint 60 à 70% pour les commerces pénalisés par les chantiers ouverts à leurs portes », déplore Gwenaël Belbeoch, alors que le quartier vient de subir une inondation sans précédent.
Huit jours après l’inondation déclenchée le 9 juillet, par la rupture d’une canalisation d’eau à l’angle du cours Albert Thomas et de la rue du Pr Paul Sisley, des riverains déploraient d’importantes pertes matérielles dans les caves et garages inondés.
Mairie absente. Ville de Lyon qui renvoie les habitants aux assurances. Froideur totale, zéro compassion. Et pourtant, la demande est simple : une benne pour évacuer les dégâts… causés par des travaux de la Ville elle-même.#Lyon8e #Responsabilité #Urbanisme https://t.co/Ha6O7jotLd
— Franck Lévy (@cflevy) July 17, 2025
Le président de l’Union des Commerçants et Artisans de Monplaisir regrette amèrement d’avoir participé aux réunions préliminaires au projet de réaménagement de l’avenue des Frères Lumière organisées par les écologistes : « Aucune alerte des commerçants n’a été prise en compte. »
Une vingtaine de commerces à vendre
Les acteurs économiques et sociaux de Monplaisir n’en peuvent plus de ces travaux imposés qui étouffent leur activité. Sur fond de nuisances sonores, de difficultés de livraison, sans parler des inondations liées à des ruptures de canalisation, Monplaisir se transforme en zone sinistrée.
La boutique de Prêt-à-Porter masculin Preppy tire sa révérence.
« Avant le lancement des travaux, il fallait patienter des mois pour trouver un fonds de commerce dans le quartier, il y en a aujourd’hui une vingtaine à vendre sur la seule avenue des Frères Lumière » constate le président de l’UCAM. Le bond de 50% en trois ans de la vacance commerciale lyonnaise n’épargne pas l’artère la plus commerçante de la rive gauche.
La librairie Mise en Page, le Club 48, lieu dédié à la danse et au fitness, la boutique de Prêt-à-Porter masculin Preppy et le torréfacteur Loutsa tirent leur révérence, dans le sillage de la pâtissière Christelle en Cuisine. D’où la profonde inquiétude exprimée par courrier recommandé, adressé le 17 avril dernier aux maires de Lyon, du 8ème arrondissement et au président de la métropole, par Gwenaël Belbeoch au nom de l’UCAM qui regroupe 80 adhérents parmi les 220 commerçants d’un quartier-village dévasté.
Des activités et un courrier en souffrance
La lettre de l’Union des Commerçants et Artisans de Monplaisir est hélas demeurée sans réponse…Les adhérents de l’UCAM réitèrent donc leur demande de prise en compte urgente de leurs trois priorités. La première ? « Supprimer la discontinuité de l’avenue des Frères Lumière à la hauteur des rues Saint Maurice et Docteur Gélibert.
« Doucet m’a Tuer ». Rideau baissé pour la pâtissière Christelle en cuisine
Casser le transit auto en passant brutalement de 8 000 passages par jour à 2000, en obligeant les automobilistes à tourner à gauche n’a aucun sens, sinon de détruire volontairement l’activité de nos commerces, privés de 6 000 clients potentiels, on fait ainsi de l’avenue des Frères Lumière, un véritable cul de sac dissuasif pour la clientèle. »
Deuxième priorité évoquée par l’UCAM : « ramener la largeur de l’avenue des Frères Lumière à cinq mètres s’impose si l’on veut préserver la pérennité de commerces aux conditions de desserte et d’exploitation, incompatibles avec le projet actuel de requalification du quartier ». La troisième priorité vise à disposer d’espaces de livraison suffisants pour desservir les magasins dans des conditions normales de sécurité.
Des pavés dans la mare
Réserver des places de type « arrêt minutes », hors places PMR, aux clients éprouvant des difficultés pour se déplacer, s’avère un troisième impératif aux yeux du président de l’UCAM. Nous dénonçons « l’incohérence et l’arc-boutisme de porteurs de projets qui auraient mérité de se réaliser par étapes progressives, coordonnées et concertées, nous n’avons jamais été opposés à la protection des piétons et des cyclistes, ni à des aménagements paysagers pour atténuer les effets de la canicule. »
Révélé par un contrôle sanitaire de la DDPP, un problème de sanitation lié à la présence de traces de nuisibles, a entraîné la fermeture du Carrefour Market de l’avenue des Frères Lumière du 10 au 15 juillet dernier. La prolifération des nuisibles ne serait pas étrangère à la multiplication des tranchées dans le quartier de Monplaisir, selon l’un des collaborateurs de l’entreprise de nettoyage missionnée pour remédier à ce problème d’hygiène.
Occasion pour Gwenaël Belbeoch de douter des vertus rafraîchissantes des cargaisons de pavés rougeâtres de la marque Kronimus, assemblés sur les nouveaux trottoirs de l’avenue des Frères Lumière : « ils me rappellent le banal pavage des allées d’accès de maisons à leurs garages, de plus leur couleur rouge les rendra brûlants en été, contrairement à des pavés blancs qui auraient permis un réfléchissement de la lumière en abaissant les températures estivales. » De nouveaux pavés dans la mare.
La bataille judiciaire de Carrefour Market
Par ordonnance du 13 mai 2025, le juge des référés du Tribunal Administratif de Lyon a rejeté un recours du magasin Carrefour Market. Lequel demandait la suspension en urgence de l’exécution de l’arrêté du 3 septembre 2024, par lequel la commune de Lyon a délivré à la Métropole un permis d’aménager des espaces publics avenue des Frères Lumière et rue du Premier Film. Selon le requérant, la participation du public au projet de réaménagement de l’Avenue des Frères Lumière aurait été privée d’effet utile, du fait des modifications substantielles apportées au projet après la phase de concertation. Pour Carrefour Market, le projet générerait également « un risque pour la sécurité routière ainsi que des troubles dans les conditions de vie des habitants et des commerçants. » Aucun de ces arguments « n’est de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de l’arrêté contesté », a conclu le juge des référés du Tribunal Administratif de Lyon.
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