Fête des Lumières 2023. Sommes-nous toujours dans l’esprit du 8 décembre ?

7 décembre, 2023 | Actualités Culturelles / patrimoine | 0 commentaires

Texte : Gregory Bruno – Dans la programmation de la Fêtes des lumières 2023 – on commence à s’y faire – une œuvre en entraîne d’autres vers le bas, se détache et fait tache, « Rose family », d’un certain Philippe Katerine…

Philippe Katerine est auteur, compositeur, interprète, acteur, réalisateur, dessinateur et écrivain français. Et c’est bien le problème. C’est une espèce de Général store de western. Un Clé minute de banlieue : à la fois clé minutier, cordonnier, graveur de plaques en plastique et, pourquoi pas débloqueur de mobiles « toutes marques » ?

Là où c’est moins drôle, c’est qu’il est né… un 8 décembre !, (ce qui lui donne le droit d’en parler aux Lyonnais), en 1968, de surcroit, ce qui le prédispose à balancer des pavés sur tout ce qui a existé avant lui. Sacré ado, ce Philippe !… On en est là quand la Direction Evénementiel de la Ville de Lyon, département Fête des lumières, lance les appels d’offres de l’édition 2023. On imagine la suite.

Chose bizarre, ce Philippe Katerine (qu’à mon avis, on a chatouillé en amont) répond à l’appel mais demande des précisions (dont la réponse sera partagée avec les autres candidats, comme c’est la règle). On imagine aussi la réponse du service (par téléphone, sans doute) : « la Fête des lumières est issue de la tradition ancestrale du 8 décembre ». Comme la liaison n’est pas très bonne et que Philippe est peut-être en pleine soirée avec quelques amis…, il comprend non pas « 8 décembre » mais « vite descendre ». Ce qui est sa spécialité. Je pense que tout est parti de là.

Il se met immédiatement à l’ouvrage et accouche de Rose family, installation destinée au parc de la Tête d’or. L’artiste s’en explique. « Sur la pelouse du parc, on fait connaissance ici, des bras, là, des pieds, plus loin des têtes et des Monsieur Rose entiers ! Ces sculptures de tailles différentes, disséminées et semi-enfouies, parlent à tout le monde ». Moi, ça me parle grave, pas vous ? L’auteur poursuit. « Le rose bonbon, les rondeurs et la simplicité apparente nous plongent directement dans la magie d’enfants qui jouent ensemble ».

On dirait Laurent Gerra imitant Fabrice Luchini qui cite les papiers culturels de Libé paraissant le mercredi. C’est énorme ! Son agent se répète : « chanteur, comédien, réalisateur, dessinateur et plasticien, l’artiste explore sans cesse de nouveaux terrains. Son humour décalé nous bouscule en douceur et son regard amusé-désabusé sur notre condition humaine nous rapproche ! Lumières et musique accompagnent cette installation »… Mouaip, je veux bien ; on essaie de nous expliquer (si une œuvre nécessite d’être expliquée, c’est souvent qu’elle n’est pas aboutie) que Monsieur Katerine donne dans une subtile provocation, art délicat s’il en est. Or manifestement, la délicatesse n’est pas son fort.

Pardonnez-moi, je vais être un peu brutal : avec sa Rose family, ce monsieur ne serait-il pas en train de se f… de notre g… ?! Et de la Fête des lumières ?! Et du 8 décembre ?! Et avec lui, ceux qui l’ont commandité ?!…Mais à sa décharge, il n’est pas le seul.

Et si on se laissait encapsuler ?!

Place d’Albon, « une installation XL » censée « exercer sa magie sur toutes les générations ». Rien que ça…

En moins trash mais guère plus poétique, un certain Guillaume Marmin nous fait une proposition place d’Albon (Lyon 2e) : « Et si on se laissait encapsuler dans un kaléidoscope unique et ludique ? Reflets, optiques insaisissables, lignes mouvantes, perspectives infinies, paysages abstraits, rythmiques et pixels synchronisés : c’est tout notre corps qui est embarqué dans cette œuvre ! Immersion au cœur de ce container très spécial, ouvert de chaque côté, nous voici au beau milieu d’une magnétique traversée. Passé-présent / Intérieur-extérieur, tout est chamboulé ! L’artiste bouscule nos certitudes. »

C’est sûr, ça ? « Il interroge nos liens avec la technologie. Cette installation XL exerce sa magie sur toutes les générations. Les images sont-elles trop captivantes ? Trop nombreuses ? De quoi nous éloignent-elles ? ». C’est exactement la question que je me posais ! N’anticipons pas. C’est peut-être très chouette à regarder, tout ça. Mais pourquoi ce discours absconse ? Comment peut-on à ce point se prendre au sérieux ? A vous dissuader d’aller voir…

Pollution verbale

Honte à toi, Fête des lumières : « la pollution lumineuse empêche de contempler le ciel étoilé dans la nuit », expliquent les auteurs de Slow light (place Rambaud).

Place Rambaud (Lyon 2e), je cite : « Une dizaine d’étudiants de la ruche barcelonaise IED Design nous interpelle sur notre consommation électrique et sur la pollution lumineuse qui empêche de contempler le ciel étoilé dans la nuit ». Et vlan ! Bien sûr qu’il faut être sensibilisé à cette question. Mais est-ce bien le moment ? De quoi vous culpabiliser un maximum de profiter de la fête des lumières. Il est vrai qu’on en n’est plus à une contradiction près.

Manufacture des tabacs. Je recite : « Deux anniversaires majeurs marquent l’année 2023. Les 50 ans de la création de l’Université Jean-Moulin Lyon 3. Et la commémoration du 80e anniversaire de la mort de Jean Moulin, héros de la Résistance. Comment ne pas s’emparer de ce calendrier pour redire les valeurs de la République et explorer le vaste héritage de Jean Moulin ? C’est donc naturellement » (ça va de soi) » que la Fête des lumières et la Manufacture des tabacs se retrouvent pour nous proposer une création originale. La projection images, sons et jeux de lumières, a été pensée et réalisée par un groupe d’apprentis-étudiants sur le magnifique bâtiment labellisé « Patrimoine du XXe siècle ». Elle met en résonance tous les engagements et les combats – passés et présents – pour la défense des libertés fondamentales ». Là aussi, là encore, tout cela mérite d’être dit avec force, rappelé et montré. Mais la « Fête » des lumières est-elle le moment opportun ?

Ces bidons de plastique enchanteurs…

Pour la place du 8 mai, un sous 8 décembre à base de bouteilles en plastique.

Place du 8 mai (Lyon 8e), je cite toujours : « Les drôles de volatiles de l’artiste BIBI sont de retour pour enchanter le quartier des États-Unis. Le défi est relevé de transformer notre quotidien en petits moments de poésie. Comment ? En fabriquant des oiseaux… avec des bidons en plastique ! À l’arrivée, quelque 400 beaux spécimens nichent au-dessus de la place du marché. Cette volière, c’est un peu la vôtre puisque chaque oiseau a été réalisé par de jeunes Lyonnais à partir de déchets plastiques… ». Là encore, l’intention est louable. Mais la présentation n’en est-elle pas un tantinet maladroite ? Relisez les 6 lignes qui me précèdent. Vous vous sentez valorisé, en tant que riverain de la place du 8 mai ? Habitant du quartier des Etats-Unis ? Ce 8 mai ne serait-il pas un sous 8 décembre ?

Issue de la tradition du 8 décembre, la Fête des lumières ne saurait devenir ni un défouloir d’artistes (au sens très large) ni l’opportunité d’une leçon d’écologie à dix balles. Elle doit rester une fête. U-ne fê-te ! Que l’on soit attaché à son origine religieuse ou, tout en la respectant, qu’on ne le soit pas. U-ne fê-te !, avec ce que cela comporte de ferveur mais aussi de poésie et de légèreté.

Allez, on se calme.

<a href="https://www.lyonpeople.com/author/marco" target="_self">Marco Polisson</a>

Marco Polisson

Rédacteur en chef
Co-fondateur du magazine.
En charge de la rédaction et responsable des partenariats.
Délégué à la protection des données RGPD

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