Philippe Fournier, chef d’orchestre globetrotteur

21 juillet, 2009 | LES GENS | 2 commentaires

philippe-fournier Photos © Saby Maviel

 

Par Agnès Guillaume

 

Après de brillantes études, Philippe Fournier fonde l'Orchestre Symphonique Lyonnais. Ce chef vit la musique hors des sentiers battus. Il aime surprendre, susciter du plaisir, créer l'adhésion, engendrer l'émotion… Son entreprise artistique est une belle réussite. Rencontre avec un homme heureux qui a su rester simple.

 

Où qu'il se trouve sur la planète, en dehors de Grézieu-la-Varenne, Philippe Fournier envoie trois cartes postales, une à ses parents et deux à ses grands-parents. « Je connais la boîte aux lettres de tous les aéroports. Je voyage avec mes racines ». Ce quadra est devenu un grand voyageur par nécessité, pour son métier. Vingt ans de tournées et concerts aux quatre coins du monde lui procurent toujours autant de bonheurs : « J'aime aller à la rencontre des autres et la musique me sert de passeport humain ». Diplômé de l'Ecole Normale Supérieure de Paris en 1984 avec le premier prix, lauréat de la Fondation Yehudi Menuhin en 1986, Philippe Fournier travaille dès l'âge de 15 ans à la direction d'orchestre. « J'ai eu la chance que Roger Cayrol me prenne sous son aile et m'initie à sa philosophie ouverte sur la dimension humaine ». En 1985, il fonde l'Orchestre de Chambre Lyonnais devenu en 2003 l'Orchestre Symphonique Lyonnais, l'un des rares orchestres privés. « Ce n'est pas une fierté, c'est un état de fait ». Les 1 000 dates en France comme à l'étranger (Allemagne, Espagne, Italie, Grèce, Suisse, Hongrie, Nouvelle-Calédonie) attestent d'une belle vitalité et d'une reconnaissance de ses pairs et du public. Le premier grand voyage s'effectue en 1988, au Canada. L'année suivante, il s'envole pour le Maroc. « Je conserve un merveilleux souvenir de ce séjour. J'ai comme toujours demandé à être hébergé chez l'habitant. Mon souhait est malheureusement rarement entendu. La peur ? Les mœurs ? Les problèmes de logistique ? Je reconnais qu'il n'est pas chose aisée de loger 80 musiciens. Quand cela se produit c'est la cerise sur le gâteau. À peine posé le pied à Marrakech, je me suis retrouvé sur la terrasse d'un bistrot qui dominait la ville avec vue imprenable sur les souks. Magique. Immersion immédiate. Cette dimension de quotidien partagé m'intéresse à tous les niveaux. Les rapports changent et j'aime à croire que mon métier de chef d'orchestre me place au cœur des relations humaines. La musique marie savoir-faire et savoir être ». De la même manière, Philippe Fournier reçoit les musiciens de passage à Lyon chez lui. « Ici, il y a mon cœur, ma famille ». Voilà comment Louis Chedid, Jean-Félix Lalanne, Marc Jolivet ou Aldo Ciccolini ont découvert Grézieu-la-Varenne.

 

Un chef qui a la bougeotte

 

Avec Philippe Fournier, si l'ancrage est primordial, les valises ont la bougeotte. « Il n'y a pas de semaine sans déplacement. Je ne pars pas toujours avec l'orchestre. Quant aux tournées internationales, elles s'enchaînent au rythme de deux par trimestre environ ». La Chine en 2008 aura marqué les annales. « Un vrai périple. Imaginez 14 heures d'avion. Atterrissage à Pékin puis un vol intérieur. On était sur scène le soir-même et le concert fini, j'ai embarqué les troupes dans un train de nuit. Et ce n'est pas fini. Un bus pour rallier les 5 kilomètres restants. Réception officielle à 13h puis dans la foulée, répétition et concert. J'ai la chance d'avoir une équipe qui me suit et me fait confiance, mais là, je reconnais que j'ai éprouvé leur résistance. Personne ne s'est plaint, peut-être du fait de la présence de mon plus jeune fils de 5 ans qui s'est montré adorable ». L'histoire se poursuit devant nos oreilles toutes ouies. « Le lendemain, les responsables nous ont emmenés visiter un temple. On était deux siècles en arrière par moins 20 degrés. Inouï ». Philippe Fournier explique quand même que la plupart des voyages se passent dans le confort. « Globalement, on est toujours dans la soie. On est là pour donner le meilleur ». Les Samsonite s'accumulent dans la cave, quatre en attente de réparation. « Je voyage très léger, le maximum de choses part avec la régie. Une chemise noire à manches courtes. Un pantalon. Mes vernis. Ma queue de pie que je roule pour éviter les plis. Je ne suis pas pour le nœud de papillon. Mes baguettes en fibre de verre, une petite trousse de toilette et le tour est joué. Ce qui me manque, je l'achète sur place ». Le retour est moins light. « J'achète au gré de mes pérégrinations et découvertes. Ici un foulard en soie, là des costumes, une statue… La constante est le tee-shirt. Mes enfants en ont un peu mare ». On lui parle de notre étonnement lié à l'absence de livres. « Je n'ai pas trop de temps pour lire. Dans l'avion, je lis/écoute les partitions du prochain spectacle. C'est une écoute légère. On est dans le temps de la rencontre et du plaisir. Ensuite, viendra le temps du travail, studieusement installé sur une table. Je pars avec mon ordinateur comme n'importe quel chef d'entreprise. La crise est passée par là. Je ressens un petit coup de frein sur les activités ». Demain, il aimerait jouer au Japon, Corée, Inde, Australie et Afrique noire… Dès que c'est possible, un membre ou la famille Fournier au complet le suit. « En 2006, je suis parti une semaine en Espagne à Salamanca avec ma fille de 17 ans. Au début, elle ne quittait pas la chambre de l'hôtel, en bougonnant devant la télé. Nous nous sommes disputés. Je l'ai forcée à sortir. Elle a pris son envol et je l'ai beaucoup moins vue. C'est ça la vie, la musique ». Ce chef d'orchestre marathonien, très loquace, un rien atypique lorsqu'il parle de sa passion donne envie de pousser les portes de cet univers qui effraie : la musique classique. « Je suis un rassembleur ». Nous public, on l'a aimé lors du concert pour Equita, on a applaudi à la salle Rameau pour le concert « l'Enfance de l'art », on a ressenti une vive émotion en assistant à « Do you speak djembés »… Aussi à l'aise dans la direction que la transmission, Philippe Fournier a l'art de vous mettre à l'aise et de vous décomplexer. Lui, suit sa voie et explore toutes les possibilités artistiques. Il a développé une réflexion sur l'utilisation de l'art comme vecteur de communication. L'endroit n'est pas propice à entamer une discussion, mais on engage tous les curieux à aller plus avant sur son site et découvrir la PMA « Pensée Musicale Active »…

 

 

2 Commentaires

  1. Marine

    J’étais au concert des Beatles hier soir … Un pur moment de bonheur. Une soirée inoubliable, Merci pour ce cadeau de Noël avant l’heure !

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  2. Emma

    Un chef d’orchestre EXCEPTIONNEL qui aime son métier et en parle avec une passion incroyable. Merci pour la conférence à l’école de commerce dans le domaine « culture et spectacle » c’était vraiment enrichissant !!! Continuez comme ça et vous arriverez un jour à diriger l’orchestre de Berlin parce que je crois en vous !!!

    Réponse

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