Etienne de Baecque. Découvreur de trésors

3 novembre, 2011 | BUSINESS NEWS | 0 commentaires

etienne de baecque 1.jpg Photo © Fabrice Schiff

 

Par Agnès Guillaume

 

Etienne de Baecque a choisi le 6ème arrondissement de Lyon pour installer son tout nouvel Hôtel des Ventes. L’endroit semble plein de promesses… vendeurs et acheteurs de « beaux ouvrages » devront désormais compter avec son coup de marteau. Rencontre.

 

Un TGV entre en gare de Lyon Part Dieu. Un métro quitte l’arrêt Hôtel de Ville. Un passant remonte le cours Vitton direction les Brotteaux. Et moi, je pousse la porte du 70 rue Vendôme. L’endroit surprend, ne ressemble pas à l’idée un peu surannée que l’on se fait d’une salle des ventes. Etienne de Baecque est satisfait. L’ancienne usine de textile s’est avérée une aubaine. Il souhaitait se démarquer, insuffler sa pâte. Pari gagné. Exit le rouge, la moquette. Ici, les murs sont blancs, la lumière zénithale grâce aux sheds. « L’ambiance atelier me plaît. Le volume et la sobriété du lieu permettent une mise en valeur des objets présentés ». Aujourd’hui, tout est calme. Pas de public. Pas de manutentionnaire. Pas d’expert. Deux salariés vaquent à leur occupation. Quant aux objets, ils attendent leur heure dans les sous-sols. Direction le bureau du patron toujours en stand by. « Je n’ai pas d’objets qui me suivent partout. Je suis peut-être trop jeune pour ce genre de souvenir ». Il réfléchit et précise. « Je n’ai pas les moyens financiers ni le droit de me porter acquéreur auprès de mes clients ». Les tringles sont encore dans les cartons, les tableaux dans les placards. On lorgne sur une sculpture en bronze de Jacques Lipchitz, un cubiste proche de Picasso, qui date des années 30. Autre regard sur une commode de Jean-François Hache, ébéniste grenoblois. On admire le travail de marqueterie. Etienne de Baecque explique qu’il s’agit d’un bois indigène et que le meuble est daté de 1775. La discussion fourmille de précisions. « La superbe » est mise en vente le 5 novembre 2011.

 

« J’étais programmé pour être avocat »

Intarissable sur son métier, le commissaire-priseur est moins affable sur sa vie privée. La discrétion lui sied. De lui, on saura l’essentiel, sa naissance à Paris, ses deux enfants, des études de droit et d’histoire de l’art, le goût des spectacles, du voyage, de la natation aussi et du ski sans oublier un amour inconditionnel pour les villes. « J’étais programmé pour être avocat. Un stage dans un cabinet spécialisé dans le domaine pénal a changé la donne. J’ai ouvert les yeux sur un travail certes intellectuellement intéressant mais trop austère ». Un peu par hasard, au sortir d’une conférence, il signe une convention de stage chez Jean-Claude Anaf. On est dans les années 2000. Etienne de Baeque devient lyonnais d’adoption. Deux ans passent, il rempile puis s’élève au rang de co-gérant jusqu’à la fracture définitive. « Nous ne nous sommes pas quitté en bons termes ». Certainement un euphémisme, tant il apparaissait comme dauphin désigné. Sans transition, on revient au temps présent. Les premières journées d’expertises ouvertes au public ont bien fonctionné. Le calendrier des ventes s’installe dans les esprits. Le téléphone sonne. Les demandes d’inventaires noircissent l’agenda. Clients vendeurs et acheteurs font circuler l’adresse. Depuis peu, Etienne de Baecque s’est associé à Géraldine d’Ouince, rencontrée sur les bancs de l’école. Un bureau à Lyon, un à Paris, le prix à payer pour viser une clientèle internationale et développer un maillage national voir transfrontalier. « Faire venir les clients à Lyon repose sur une recherche de discrétion, une très bonne communication et pour certains l’envie de sortir de la masse écrasante de Drouot. Lyon offre aujourd’hui une visibilité ».

 

Se faire un œil

Se faire un nom nécessite des années de présence. Se former l’œil prend une vie. « Notre domaine de compétences n’est jamais acquis. Il y a toujours un artiste, une signature, une poupée, un autographe, une gravure à découvrir ». Musées, galeries, hôtel des ventes, vide-greniers, édifices religieux constituent un vaste terrain de jeu. « J’ai la chance que mon métier et mes loisirs se confondent en partie. Récemment, lors d’un week-end chez des amis en Ardèche, j’ai visité le musée d’art moderne de Céret, créé en 1950 par Pierre Brune et Frank Burty Haviland. Et bien là, dans cette petite commune, où le gardien fait le tour avec vous, j’ai découvert une collection incroyable, fruit des séjours des plus grands artistes du 20ème siècle. » Parfois le détour est plus studieux comme la visite du musée international d’horlogerie à La Chaux-de-Fonds en Suisse. Etienne de Baecque accumule les anecdotes. On apprend que ses enfants lui ont appris le détachement. « Je vis entouré d’objets, mais je sais que tout peut casser, surtout une coupe en cristal de Baccarat fin XIXème ». « L’inventaire au domicile d’un client est un moment magique. Chaque visite recèle la possibilité de découvrir un bel objet oublié, délaissé, déprécié. Un jour, un client m’envoie une photo d’un meuble hérité de sa grand-mère recouvert de cuir Louis Vuitton. Il voulait un avis consultatif sur la somme escomptée. J’ai immédiatement reconnu le travail d’un décorateur des années 50, Paul Dupré-Lafon. On a pris rendez-vous. Chaque pièce passée au peigne fin a apporté son lot de surprises. Jusqu’au jour J de la vente, le client était très perplexe. Il m’a même glissé à l’oreille être d’accord pour vendre à moitié prix de mon estimation. A la fin de la journée, la somme était très très rondelette. Rendre toute sa valeur à un objet, grâce à sa datation et sa provenance, est un des bonheurs de notre métier. Cela implique de la confiance, un regard, des connaissances accumulées, une part d’intuition, un travail en équipe avec des experts ».

 

Une fois la surprise digérée, certaines personnes ne savent plus si vendre est la bonne décision. Heureusement pour les commissaires-priseurs, ils vendent en général. Il ne nous reste plus qu’à voir Etienne de Baecque dans l’exercice du maniement du marteau. A vos calendriers !

 

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